Carnet de route de Corée


 

 


Corée du Sud – Au pays du matin calme

A part une coupe du monde que nous préférons effacer de nos mémoires, que connaissions-nous de ce pays avant d'y arriver ? Pas grand chose et c'est ce qui nous a attiré… Cap sur un pays à part où modernisme et néons multicolores n’ont pas éclipsé des traditions bien ancrées. Étonnant!

대한불교 조계종 !

    Premier choc : tout est propre, organisé, balisé. Les véhicules s'arrêtent au feu rouge... sauf un tandem conduit par deux français (et oui ! difficile d'oublier les mauvaises habitudes chinoises). On ne klaxonne pas, On ne double dans les virages. Les voitures rutilantes et puissantes ne crachent pas de fumées noires. On ne s'entasse pas à 5 sur une moto. Aucune chèvre sur le toit des bus (comme au Laos !), aucun attroupement de 50 personnes autour de nous. Nous roulons incognito, presque déçus de ne plus être l'attraction du moment... Nous avons déjà un peu quitté l'Asie !

    Second choc : les prix !! 10 euros une pastèque, 8 euros pour de minuscules filets de bœuf, 25 euros la nuit d'hôtel, 3 euros la soupe aux nouilles... Nous sommes revenus dans un pays où Mac Do n'est plus un restaurant de luxe !

    Troisième surprise : nous passons notre première nuit dans un motel d'apparence extérieure classique. Sauf que notre lit est en forme de gros cœur rose, la lumière de la lampe de chevet est rouge, nous avons des miroirs au mur et des cassettes X à notre disposition ! Nous avons atterri dans un très répandu "love-motel", maison de rendez-vous pour amants plus ou moins légitimes. Nous découvrons aussi le (mauvais) goût prononcé des Coréens pour le kitch : néons ultraviolets dans les cybercafés, hôtels construits sur le modèle du château de la belle au bois dormant d'Euro-Disney, du rose, des cœurs, de la crème et des nœuds-nœuds partout...

Séoul la tentaculaire !

     Après Athènes, Bangkok et Pékin, plus rien ne nous impressionne, nous décidons d’entrer dans Séoul en pédalant, trop facile... Nous aurions voulu nous suicider, nous n'aurions pas choisi mieux ! Séoul est une ville tentaculaire (plus de 100 km d'agglomération d'ouest en est) entièrement dédiée à la reine voiture : pas de pistes cyclables, des routes à 8 voies et des bolides partout qui nous frôlent à chaque instant ! Grosses montées d'adrénaline lorsque nous zigzaguons dans les embouteillages au milieu des gratte-ciel. L'expérience aidant, Seb manie le tandem avec maestria, on se prendrait presque au jeu !

     Nous passons quelques jours à Séoul. La ville a été remodelée par les jeux olympiques et la très rapide croissance économique des vingt dernières années. Les buildings les plus hauts, les plus brillants ont poussé partout. Le centre-ville ressemble à ces films futuristes : gratte-ciel, enseignes multicolores et men in black pressés accrochés à l'oreillette de leur téléphone portable. Peu de place laissée à la nature, à l'improvisation...

     Quelques quartiers ont heureusement gardé de leur charme populaire : rues étroites, gargottes où grillent des maquereaux, marchés animés... Nous visitons le palais impérial et ses agréables jardins, petite « Cité Interdite » reconstruite il y a quelques dizaines d'années. Peu d'édifices anciens sont d’époque en Corée, les japonais ont malheureusement tout saccagé lors de leurs multiples invasions.

De Séoul à Sokcho : des montagnes, des lacs,des montagnes, des lacs...

     Rapidement, nous quittons la circulation et les pots d'échappement pour les montagnes du nord. Nous passons une semaine idyllique sous un soleil radieux : petites routes calmes encadrées de magnifiques montagnes vertes et surplombant de nombreux lacs turquoises. Nous retrouvons avec plaisir l'odeur des pins et... du pain. Nous trouvons des boulangeries dans de nombreuses villes aux enseignes bien de chez nous « Paris-Baguette », « Tous les jours », « Renaissance ». Nous campons à notre gré près des cours d'eau, pique-niquons sous les arbres... La belle vie tranquille !

    Les Coréens sont charmants avec nous. Certainement soucieux de l'opinion des visiteurs sur leur petit pays, ils se montrent courtois, doux et serviables On nous comble sans cesse de petits cadeaux : fruits, boissons, yaourts, poisson séché (!?!), bombes anti-crevaison, et même une nuit en bungalow (offerte par un hôtelier alors que nous nous apprêtions à camper dans son jardin... sans le savoir !). Ces attentions nous touchent, nous nous sentons « relax ». Des vacances après la Chine !

La côte est : camions, barbelés et mousson

      Des côtes découpées, des forêts de pins, des plages de sable fin, des ports de pêche lovés dans des criques, des odeurs iodées... la Corée du sud aurait beaucoup à offrir aussi côté mer. Sauf que la route nationale 7 que nous suivons est bondée de camions et que la mousson a décidé d'arriver plus tôt cette année. Nous passons dix jours à hésiter : pédaler sous le déluge ou rester au chaud à l'hôtel ? Entre deux accalmies, nous poursuivons notre route en empruntant dès que possible les chemins détournés. Nous jouons au yo-yo dans les montagnes, franchissant d'innombrables petits cols dans la même journée. Le prix à payer pour être au calme...

     Dans les montagnes à pic, les coins pour faire du camping sauvage sont difficiles à trouver. Nous repérons un soir un lieu idéal, sous les pins au bord de la mer. Nous obtenons l'autorisation d'y planter notre tente auprès d'une voisine. Le terrain est plat, on entend le roulis des vagues. Au milieu de la nuit nous sommes réveillés par deux militaires armés jusqu'aux dents. « You can't sleep here », « Dangerous area », « Military Position ». Nous avons beau essayer de négocier, rien n'y fait... (nous ne sommes guère crédibles en pyjama...). On nous déplace illico-presto sur un terrain en pente, sous la lumière d'un lampadaire. Les chiens des maisons alentours n’en ont pas dormi de la nuit... nous non plus.

     Des clôtures de barbelés, des bunkers, des tours de guet et des camps militaires protègent les côtes sud-coréennes. Les plages ferment la nuit et sont éclairées par de puissants projecteurs. Des équipes font continuellement des rondes pour protéger le pays d'un éventuel débarquement. Toutes les frontières, maritimes comme terrestres, sont considérées comme zones militaires sensibles. Peut-être pas à tort... En 1996, un sous-marin espion nord-Coréen s'était échoué à quelques kilomètres de là. 22 militaires et civils ont été tués lors de la prise du vaisseau. La Corée du sud vit perpétuellement sous la menace de sa turbulente voisine du nord. Encore au début des années 90, des tunnels d'infiltration ont été découverts à la frontière… Malgré les discours d'unification, la situation reste tendue dans la région.

Des temples de Gyeongju aux russes de Busan

     Le ciel nous offre de temps à autre un peu de répit pour visiter la région de Gyeongju. La ville et ses alentours recèlent de jolis sites anciens : tombes impériales de plus de 2000 ans, temple de Bulguksa classé au patrimoine de l'Unesco... Enfin une ville coréenne qui a conservé d'anciens quartiers aux maisons traditionnelles : des ruelles pavées, des temples, des toits gris tarabiscotés, le tout dans une atmosphère paisible. Notre pension est installée dans l'une de ces vieilles demeures aux poutres apparentes décorées de calligraphies et d'objet anciens rustiques. A la belle saison, le propriétaire organise des soirées dans la cour. Nous n'échappons pas au soju maison, sorte de vodka dans laquelle marinent des champignons. Nous passons de bons moments à échanger des anecdotes avec d'autres voyageurs. Et surtout... nous avons accès à une cuisine équipée. Nous préparons des crêpes, un luxe pour nous ! Nos estomacs exigeants de bon français commencent à faire un blocage sur l'intéressante mais peu variée cuisine coréenne. Nous ne pouvons plus avaler de bibimbap, bulgogi, algues et autres kimchis (légumes fermentés, vinaigrés et épicés servis à chaque repas).

     Après quelques jours dans notre havre de paix, nous filons rapidement vers Busan pour préparer notre départ pour les Andes. Avec 3,5 millions d'habitants, Busan est la deuxième ville du pays. C'est un important port proche du Japon et de la Russie. Les rues regorgent de russes de Vladivostok venus en Ferry faire des affaires. Nous apprécions son ambiance décontractée plus populaire et cosmopolite que Séoul.

     Pour rejoindre Lima, il nous faut revenir à l’aéroport de Séoul. Après l'avion, le bateau, le bus, le pick-up, le camion et le taxi-charette, Agriates, expérimente le voyage en train et en métro.